Dossiers thématiques et Filmographies
Histoire de l'Amérique latine*
« l’Histoire nous appartient et ce sont les peuples qui la font »
Salvador Allende, 11 septembre 1973
Dès la Conquête par Christophe Colomb, le feu a pris sur le continent. Pas uniquement le feu de la forêt amazonienne vu cet été sur nos écrans, mais aussi le feu du canon par lequel on passa les peuples indigènes, ou enfin ce feu sacré qu’on appelle aussi conviction, qui motiva les hommes à se révolter ou à réaliser de grandes choses.
Le film « 1492 : Christophe Colomb » (Ridley Scott, 1992), nous met dans la peau de ses découvreurs qui font route vers l’inconnu avec milles questions en tête. « Aguirre la colère de Dieu » (Werner Herzog, 1975) décrit la folie qui emporta certains conquérants comme le héros, incarné par Klaus Kinski, dans sa quête de l’Eldorado.
Ces conquérants espagnols, qui n’étaient autres que des prisonniers relâchés, des aventuriers, des paysans se sont retrouvés face à des peuples et des coutumes insoupçonnées. Peuples que le bon clergé d’Espagne s’empressera d’évangéliser à coup de glaive et de crucifix tout en se posant la question de leur humanité comme nous le décrit « la Controverse de Valladollid » (Jean-Daniel Verhaeghe, 1991).
Non pas que la vie des peuples autochtones avant l’arrivée des espagnols ait été plus douce pour autant. Les royaumes et les Etats qui peuplaient le continent avaient aussi leurs lots de cruautés : « Apocalypto » (Mel Gibson, 2006). Cet aspect violent des peuples indiens a aussi laissé des traces dans l’imaginaire collectif que nous décrypte Yves de Peretti dans son documentaire « Tu es, je suis… l’invention des Jivaros » (2002). Ces peuples nourrissent aussi quantités de fantasmes et de mystères quant à leurs façons de vivre : « Le nouveau Monde » (Terrence Malick, 2006), « La Prophétie de Piatsaw » (Pierre Bessard, 2005) ou « L’étreinte du Serpent » (Ciro Guerra, 2015).
Il y eu pourtant au cours de l’histoire, quelques bons pasteurs qui se mirent à leur service, comme les jésuites de « Missions » (Roland Joffé, 1986) qui ne se contentèrent pas d’évangéliser, mais aussi d’enseigner et de développer la communauté Guarani jusqu’à en être désavoué par le clergé… ou bien aussi des religieux catholiques tels Mgr Romero qui ralliera le mouvement de la Théologie de la Libération sur la fin de son parcours quitte à y laisser sa vie, comme nous le relate « Salvador » (Oliver Stone, 1986).
Les révoltes contre l’injustice jalonnent l’histoire du continent : Au Mexique, « Viva Zapata ! » (Elia Kazan, 1952) décrit par le menu l’origine d’une révolte historique et les affres de l’attrait du pouvoir sur les hommes. « El Violin » (Francisco Vargas, 2007) évoque lui, un conflit mexicain plus récent. « Campesinos-Histoire d’une résistance » (Fabien Lacoudre et Sarah Pick, 2008) suit des indiens et paysans boliviens en lutte qui parviendront à l’avènement d’un homme politique hors du commun comme décrit dans « la voie d’un peuple » (Bruno Lorvao, Grégory Shepard, 2007).
Un homme politique hors du commun comme fut aussi Salvador Allende gagnant les élections démocratiques de 1970 au Chili et renversé 3 ans après par Pinochet. De nombreux témoignages illustrent cette période historique du Chili : « Chile » (Raymond Depardon, Chas Geretsen et David Burnet, 1974), retrace avec émotion les événements qui virent l'anéantissement de la démocratie et l'instauration du régime totalitaire de Pinochet. De nombreux réalisateurs donnèrent alors au monde à voir ce que fut cette dictature : Patricio Guzman, cinéaste actif pendant la période du Front Populaire, est particulièrement connu pour avoir réalisé « La Bataille du Chili » composée de 3 parties documentaires tournées entre 1975 et 1980 et « Salvador Allende : "Je me souviens du 11 septembre 1973, ..." », José Maria Berboza avec « Pinochet et ses trois généraux », de 2004, Carmen Castillo avec « Rue Sante Fe » en 2008, et Bruno Muel « Septembre chilien » 1973, entre autres.
Les drames personnels engendrés par ce coup d’état se sont aussi révélés sources inépuisables d’inspiration pour des fictions permettant de nous immerger totalement dans la peau de ceux qui vécurent ces événements « Missing » (Costa Gavras, 1982) restera longtemps la seule référence de fiction sur le sujet. Depuis, « Mon ami Machuca » (Andrès Woods, 2005), « Santiago73, post mortem » en 2010, « No » en 2012 et « Neruda » en 2016 de Pablo Larrain, ou « Colonia » (Florian Gallenberger, 2015) nous ont proposé de nouveaux angles de vue de ces événements.
Le Chili n’est malheureusement pas le seul pays d’Amérique Latine à avoir eu à souffrir d’une dictature. Le Guatemala peu connu, est traité à travers l’interview d’un de ses poètes dans « Le correspondant de guerre » (Stéphane Gatti, 1985), l’Uruguay dans « Secretos de lucha » (Maiana Bidegain, 2007), l’Argentine dans « Les orphelins du Condor » (Emilio Pacull, 2004) où sont évoqués les enfants volés par la dictature.
Les enfants ont d’ailleurs souvent été le médium pour transmettre l’histoire de l’Argentine : « El premio » (Paula Markovitc, 2011), « Kamchatka » (Marcelo Pineyro, 2004) ou encore « L’histoire officielle » (1985) pour ne parler que des fictions, mais quelques documentaires évoquent aussi ces enfants emportés par l’Histoire : « Panzas » (Laura Bondarevsky, 2001). Ils sont aussi au cœur de l’histoire violente du Brésil « Zona Oeste » (Olivier Zabat, 1999).
La Violencia est aussi le nom donné à une période de l’Histoire du 20eme siècle de la Colombie illustrée par « Les Condors ne meurent pas tous les jours » (Francisco Norden, 1984) et qui ne s’arrête pas vraiment, si l’on en croit le documentaire « L’Affaire Coca-Cola » (German Gutierrez, 2010)…
‘Terres de feu’ peut-être aussi à cause des guerres incessantes que se livrent les cartels de la drogue sur ce continent : « Cartel Land » (Matthiew Heineman, 2015) et « Miss Bala » (Gerardo Naranjo, 2011) au Mexique. « Mateo » (Mara Gamboa, 2014) et « Manos sucias » (Josef Kubota Wladyka, 2014) en Colombie.
Très souvent, dans l’Histoire de l’Amérique Latine, le Grand Frère du Nord est présent, pour protéger son arrière-cour par ses armes et sa puissance économique et créant de l’attraction-répulsion parmi la population qui tente à la fois de se révolter mais aussi de gagner ce nouvel eldorado pourtant bien protégé : « rêves d’or » (Diego Quemada-Diez, 2013) ou « La frontera infinita » (Juan manuel Sepulveda, 2007).
Cette filmographie non exhaustive de l’Histoire du continent latino-américain ne peut se terminer sans la mention de quelques œuvres cinématographiques mettant en lumière des personnages du monde de l’art comme Pablo « Neruda » (Pablo larrain, 2016) et « Frida Khalo, nature vivante » (Paul Leduc, 2009) ou « Chavela Vargas » (Catherine Gund et Daresha Kyi, 2017) comme trois témoins d’une partie de cette grande Histoire.
*Hors Caraïbes
Voir aussi : Festival international du film d’histoire de Pessac du 18 au 25 novembre 2019 : Amérique latine : terres de feu